[Terminé - Pv Valkyon] Lâcher prise

Encore une expédition en solitaire. Il n’aimait pas cela. Surtout par les temps qui couraient. Laisser une de ses gardiennes partir seule… Malgré ses réserves, Valkyon avait consenti à la laisser partir. Après tout, n’avait-elle pas déjà prouvé sa valeur ? Et puis, à part avec certain autres éléments, Caméria travaillait souvent bien mieux lorsqu’elle était seule. Cela n’empêchait pas Valkyon ne rester inquiet. Il avait perdu énormément de gardien ces derniers temps, des confirmés comme des débutants. La perte de plusieurs de ses gradés lui restait encore en travers de la gorge. La mort de Grishmark l’avait particulièrement touché. Gardien talentueux et respecté, apprécié par ses paires et la population, redoutable combattant et bon pédagogue... Depuis combien de temps déjà le connaissait-il? Trop longtemps pour pouvoir le dire.

Il soupira.

Bientôt il lui faudrait choisir de nouveau gradé. Il y avait désormais deux places à prendre, aux côtés d’Athénaïs. Si la valkyrie faisait un excellent travail au niveau de l'entraînement des jeunes recrues et de la paperasserie, Valkyon se doutait bien que la gradée aurait préféré monter au front, continuer à chasser les mercenaires.

Il vérifia une dernière fois l’état des armes de sa subordonnée.

Oui, il préférait désormais vérifier lui même l’équipement de ses gardiens qui partaient pour de longues missions. Mission dont ils ne sortiraient probablement pas indemne, mais au moins vivant. Il ne tenait pas à les perdre, surtout quand ils pouvaient prétendre au titre de gradé, comme Caméria qui remplacerait très certainement Gwynaël. Elle avait fait ses preuves. Caméria s’amusait de son nouveau comportement, le comparant sans cesse à Nevra, le “père-poule”.

Satisfait, il sortit de la forge.

Gravissant l’escalier, il se dirigea assurément vers le laboratoire d’alchimie ou Ezarel devait très probablement se trouver. Le chef des obsidiens s'apprêtait à frapper pour annoncer son arrivé, mais la porte du laboratoire, si cher à l’elfe bleu, était entrouverte. Le faelien finit par pousser la porte. Dans la lumière déclinante du jour, il reconnut Erika. Passant le seuil du laboratoire, il jeta un regard circulaire à la pièce. Pas d’oreilles pointues à l’horizon. Juste, une Erika qui semblait particulièrement absorbé par sa tâche. Il l’avait salué d’un mouvement de tête avant de se détourner. Non, elle ne devait pas savoir ou il se trouvait. Il doutait que la jeune femme cherche encore à courir après tout le monde avec… Tout ce qu’il s’était passé.

Une barre, soucieuse plissa le front de l’obsdien. Et finalement se rapprocha de la jeune absynthe.


-Pourquoi n’es tu pas aller voir Athénaïs ? lui demanda t-il directement.

Le ton, interrogateur, sans animosité aucune. Il aurait pu être énervé. Il aurait pu lui en vouloir. Après tout, elle avait failli les trahir. Ne l’avait-elle pas fait d’ailleurs ? Mais elle devait bien avoir quelques raisons, et pour le coup, il avait envie de les entendre avant de porter tout jugement.

Son regard, d’abord rivé au visage de la femme, glissa vers le grimoire, ouvert sur une page qu’il ne connaissait que trop bien. Seul le tressaillement de sa mâchoire trahit, sa surprise, son doute, peut être, un léger énervement. Il reporta son regard vers la gardienne. Chaque chose en son temp. Une question à la fois.

- Il est de notoriété publique que ta gradée n'hésite pas à blesser ses subordonnés. A ton avis je devais m'attendre à quoi si j'y allais? Ezarel n'a jamais dit que c'était une obligation.


Il avait haussé un sourcil. Se moquait-elle de lui ? Si oui, elle n’allait pas le faire longtemps.  

-J’admet qu’Athénaïs peut parfois se montrer virulente quand il s’agit de correction. Tu le méritais peut-être. Ezarel ne t’aurais pas donné ordre d’aller la voir sans raison. Il n'est pas si sadique.

Si son ton restait doux, presque caressant, son regard se fit vaguement plus froid.

- Ne te moques pas de moi. “Tu passeras voir Althéa et Athénais.”,“Tu as fait une connerie, tu assumes.” Ne sont-ce pas là ses mots exactes ? Ne me dis pas qu’il ne s'agissait pas d’un ordre.

Oui, il savait tout. Ezarel lui en ayant parler, car, indirectement, il était impliqué dans cette affaire de par sa subordonnée. La communication passait relativement bien entre les chefs de garde.

Le gardien croisa les bras sur son torse.

- Tu vas m'imposer d'aller la voir?

Valkyon se retint de soupirer. Il se rapprocha encore, et prenant soit soit de fermer soignement le grimoire, il posa une fesse sur la paillasse et posa son regarde mordoré sur la gardienne. Certe, elle n’était pas bien, certe, ce qu’elle avait fait, ce qu’elle faisait à l’instant même devait lui peser. Humainement, il comprenait qu’elle soit sur la défensive, il pouvait comprendre qu’elle craigne sa subordonnée, mais en sa qualité de chef de garde, il n’acceptait pas son comportement: ni celui qu’elle avait eu, ni celui qu’elle avait en à ce moment même. Elle avait délibérément passé outre l’injonction d’Ezarel. Ce fut pourtant avec un calme presque étonnant qu’il éloigna de la demoiselle le moindre de ses ingrédients, les mettant derrière son dos. Il faisait ainsi barrière entre Erika et ses projets. A elle de voir si elle voulait qu’il se lève.

- Non.

D’un geste de la main, il l’invita à s’asseoir en face de lui. Invitation qui n’admettrait aucun refus, ni objection.

- Par contre je vais t’imposer ici et maintenant de m’expliquer ce qui t’ai passer par la tête.

Il leva un doigt pour l’empêcher de parler. Il n’avait pas finit.

- Je ne suis ni Ezarel, ni Nevra. Parles sans détours.

Valkyon l’écouta parler sans l’interrompre. Il se retint de soupirer. Il la comprennait. Elle avait de bonne raison pour l’avoir fait. Mais …

-Tu n’es qu’une enfant. Une enfant naïve, buté et inconsciente, voir même suicidaire.

Il fronça légèrement les sourcils. Ce n’était pas une insulte, juste une constatation qu’il avait lancé comme une vérité, comme s’il avait dit: “le ciel est bleu”. Il n’était pas agressif, loin de là. Calme, il n’y avait aucune méchanceté dans ce qu’il disait.

- Je te crois quand tu dis ne vouloir faire de mal à personne. Je ne doute pas de ta bonne parole. Je connais ta bonté et ta générosité, tu ne ferais pas de mal à un blackdog si tu pouvais l’éviter. Mais tu aurais finis, contre ton gré par le faire. Pensais tu réellement que le pire qui pouvait t’arriver ne serait qu’une banale exécution? Je ne pense pas qu’on t’ai assez entraîné pour supporter la douleur d’un interrogatoire fait par ce genre de personne.

Valkyon croisa les bras.


-Je te rassure, les corrections d’Athénais sont moins douloureuses.

Il la jaugea du regard. Il doutait qu’elle puisse jamais regretter ce qu’elle avait fait. Mais il osait espérer qu’elle se rendrait compte de sa bêtise.

- Tu te jettes dans la gueule du blackdog pour … Rien finalement. Et tu pensais sérieusement que nous resterions les bras croisé alors qu’une de nos gardiennes, une précieuse camarade manque à l’appel ? “Seule victime” ? Partant seule sans rien dire tu nous cause plus de soucis qu’autre chose ! Si nous t’interdisons certaines choses, c’est que nous avons nos raisons. Es- tu kamikaze Erika ? Tu est prête à risquer ta vie, pour une information? Mais si tu meurs, à quoi t’aurait-elle servie ?

L’expression de son visage s’adoucit quelque peu:

- Et personnellement, je m’en serais voulu qu’il t’arrive encore quelque chose après tout ce que tu as vécu ici.

Il décroisa les bras pour poser ses mains sur la paillasse, ses doigts effleurants un morceau de papier. Se tournant, il le prit entre ses doigts.

- Je conçois qu’après tout ce temps tu t’impatientes, mais cet homme est une anguille qui ne laisse pas de trace derrière lui, nous sommes en période de crise, et malgré tout notre bonne volonté, nous ne pouvons maintenir ,de façon linéaire, une quête aussi personnelle, tout en assurant la sécurité de chacun.

Il lui désigna l’infirmerie du menton en ouvrant la lettre.

-La prochaine fois que tu iras aider Ewelein, discutes, avec chacun de ses patients. Tu serais surprise, de voir quel moyen nous déployons pour faire taire tes interrogations.

Il en avait finit avec cette partie. Inutile de prolonger la discussion. Il baissa les yeux vers le feuillet, et commença à lire. Ainsi ce n’était pas d’eux qu’elle voulait se soustraire. Au vu des derniers évènements, n’importes qui aurait pensé qu’elle veuille se faire oublier de la garde. Il replia la feuille et la lui tendit.

- Avec ça… Je n’ai pas d’autre interrogation

Posant sa main sur l’épaule de la jeune femme, il plongea son regard dans le sien:

-C’est la meilleure chose à faire. Je vais t’aider.

- Tu as dit que je vous causais du souci... et que tu t'inquiétais qu'il m'arrive quelque chose... Pourquoi vouloir à ce point me garder ici? Que faites-vous de ceux qui ne veulent plus rester?

Que pouvait-il bien répondre à cela ? Ainsi, elle souhaitait partir. Cela ne l’étonnait pas. Il ne pouvait la retenir, ni lui dire de rester, cela lui donnerait certainement envie de les fuir. Il y avait toujours un moment ou dans la vie des gens, il fallait savoir … Lâcher prise. Refaire le point avec soit même, savoir ce que l’on voulait exactement, si ce que l’on faisait correspondait bien à nos attentes. Erika n’avait pas vraiment eu le choix concernant son entrée dans la garde. Peut-être maintenant avait-elle ce choix ? Peut-être pourrait-elle enfin “s’installer” ? Et vivre sa vie ?

- En plus de paraître égoïste, je vais passer pour la pire des ingrates... Je le suis très certainement.

Valkyon ne le pensait pas. Elle avait eu besoin de la garde pour avoir un toit sur sa tête, de la nourriture, une certaine protection, en échange de quoi, elle a travaillé comme tous gardiens. Pour lui, la concernant, il n’y avait pas d’ingratitude. Certes, elle avait joué la carte de l'égoïsme pour avoir des informations, mais mis à part cette bévue, Erika avait toujours bien travaillé. Si elle voulait partir, ils ne pourraient la retenir, si elle le faisait dans les règles, elle n’aurait droit qu'à une certaine surveillance pour s’assurer qu’elle ne regagne pas les rangs ennemis, mais ça il ne le lui dirait pas, pas tout de suite du moins.

- Non. Nous ne faisons rien. Tu veux partir? Lâcher prise ? Soit. C’est possible, tu peux en faire la demande, mais dans les règles pour ne pas passer pour une traitre.

Rien dans le sens ou il n’y aurait pas de sortilèges, pas de potions mnémosyne, pas de coupage de langue et encore moins d’assassinat.

- Mais si tu pars, ou irais-tu ?

Oui, ou irait-elle? Il se le demandait. Elle voulait partir, mais y avait-elle réfléchit ? Savait-elle ce qu’elle voulait ?

- Mais me concernant, je ne te laisserais pas partir. Pas tant que tu m'auras pas comment tu comptes survivre.

Un froncement de sourcil suspicieux et Valkyon ne donnait plus cette impression de sécurité en sa présence. Quelque chose le dérangeait. Erika semblait vouloir, mais ne semblait pas disposé à respecter les règles. L’air pensif de la jeune femme le dérangeait, certainement plus qu’il ne l’aurait voulu.

- Tu n’as rien à perdre à essayer. Tu as plutôt tout à gagner.

La tranquillité. Cela n’avait pas de prix.

- Je ne sais pas ce que tu as en tête Erika, mais si tu fugues, tu seras considéré comme tu traîtresse. Si tu disparais, nous nous lancerons à ta recherche. Et s’il s’avère que c’est une traîtrise de ta part, tu seras exécuté.

Il fit une pause avant de reprendre.

- Et je comme pour d’autre, je ferais très certainement partie du corps exécutif. Ce n’est pas une menace. Juste une mise en garde.

D’un geste, l’obsidien l’invita à sortir de la salle d’alchimie.

- Quoi qu’il en soit, réfléchit bien à ce que tu vas faire. Je ne saurais trop te conseiller d’en parler à Miiko, à Nevra aussi. Il serait plus amène à comprendre ton désir d’évasion.

L’obsidien ferma la porte derrière eux.


- Tu devrais aller te reposer, conseilla t-il en indiquant du menton le corridor des gardes.